Une autre belle rupture de ton...

Merci à Jean-Louis de m'avoir envoyé les références du texte de Lévi-Strauss. Ça me rappelle ce que j'ai écrit sur la musique de Grouper...


Claude Lévi-Strauss, à propos de Chopin :

« Pour favoriser en moi l’apparition de certaines émotions, je n’avais
plus besoin de l’excitation complète : le signe, l’allusion, la
prémonition de certaines formes suffisaient.

Lieues après lieues, la même phrase mélodique chantait dans ma mémoire
sans que je pusse m’en délivrer. Je lui découvrais sans cesse des
charmes nouveaux. 

Très lâche au début, il me semblait qu’elle
entortillait progressivement son fil, comme pour dissimuler l’extrémité
qui la terminerait. Cette nouure devenait inextricable, au point qu’on
se demandait comment elle pourrait bien se tirer de là.

Soudain, une note résolvait tout, et cette échappatoire paraissait plus hardie encore
que la démarche compromettante qui l’avait précédée, réclamée et rendue possible.

A l’entendre, les développements antérieurs s’éclairaient
d’un sens nouveau : leur recherche n’était plus arbitraire, mais la
préparation de cette sortie insoupçonnée. 

Était-ce donc cela, le voyage ? 
Une exploration des déserts de ma mémoire, 
plutôt que de ceux qui m’entouraient ? »

Claude Lévi-Strauss, Tristes Tropiques, 1955.








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